36 – Traque rue de la Gare
14 rue de la Gare à Valdoie (photos : René Bernat)
(photos : R. Bernat, Famille Wehrlé, A. Sachet)
(Article d’André Sachet, correspondant à L’Est Républicain, édition du vendredi 17 juin 2016)
Fonds privé : Famille Wehrlé
Source : Fonds privé famille Wehrlé
Transcriptions d’actes de décès
(Source : Mairie de Valdoie)
Liste des noms de Juifs déportés, Mémorial de la Shoah, Paris (Photos : Coralie Bernat)
Feuille de témoignage de victime de la Shoah
(Source : Comité Français pour Yad Vashem)
(sources : ADTB)
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D’après le nouveau statut des Juifs et la loi du 2 juin 1941
Est regardé comme Juif :
1. Celui ou celle appartenant ou non à une confession quelconque qui est issu d’au moins trois grands-parents de race juive, ou de deux seulement si son conjoint est lui-même issu de deux grands-parents de race juive.
Est regardé comme étant de race juive le grand-parent ayant appartenu à la religion juive.
2. Celui ou celle qui appartient à la religion juive ou y appartenait le 25 juin 1940 et qui est issu de deux grands-parents de race juive.
Le désaveu ou l’annulation de la reconnaissance d’un enfant considéré comme Juif sont sans effet au regard des dispositions qui précèdent.
Loi du 2 juin 1941
Déclaration de l’état de Juif au préfet ou au sous-préfet indiquant état civil, profession, état de leurs biens.
Toute infraction est punie d’emprisonnement de 1 mois à 1 an et d’une amende de 100 à 10 000 Frs, sans compter l’internement dans un camp spécial, même si l’intéressé est Français.
L’occupant exige fréquemment des recensements. Répondant à la demande des Services de Police allemands, l’administration réclame donc régulièrement des listes de Juifs à chaque préfecture.
Ces derniers ont l’obligation de se faire inscrire avant le 20 octobre 1940 sur un registre spécial, ce qui inquiète le maire de Giromagny qui n’a toujours pas reçu le formulaire.
Ces listes indiquent la date et le lieu de naissance, la profession et l’adresse. Pour le département de Belfort nous en avons en octobre 1940, en 1941, en 1942, en janvier 1943.
234 Juifs sont dénombrés dans le département de Belfort le 15 juin 1941.
Ces recensements particuliers visent d’abord à connaître la nationalité des israélites.
Les maires doivent répondre à l’enquête du délégué régional de la Police des Questions Juives. A Valdoie les dix Juifs présents sont tous de nationalité française.
La loi du 4 octobre 1940 prévoit l’internement des Juifs étrangers dans des camps.
Un télégramme demande d’abord de compter les Juifs étrangers.
Ils seront les premières victimes des déportations. Le 12 avril 1941, 81 Juifs étrangers sont dénombrés dans le département de Belfort parmi eux 59 Polonais et 12 apatrides.
En 1942, le recensement des Juifs étrangers à Belfort nous montre qu’ils ont été majoritairement arrêtés par la rafle du 12 juillet ou bien qu’ils sont en fuite.
Cette rafle commandée par le préfet régional de Dijon frappe 19 Polonais qui laissent derrière eux 28 enfants confiés à l’Union Générale des Israélites de France. Le 18 octobre une nouvelle rafle concerne 16 autres personnes.
Le Préfet s’adresse au Commissaire de police car parfois, il soupçonne certains de dissimuler leur judéité et il demande donc de procéder à une enquête discrète pour vérifier la qualité d’aryen.
Puis, l’administration se fait plus pressante. Dans un télégramme venu de Paris en 1942, elle réclame un recensement par catégories, professions, sexe, âge et nationalité.
Elle veut également savoir qui est concerné par un mariage mixte.
Si des Juifs arrivent dans une commune, le Maire doit immédiatement les signaler et avertir la Préfecture comme le fait celui de Valdoie le 21 avril 1942.
Loi du 11 décembre 1942, relative à l’apposition de la mention « Juif » sur les titres d’identité délivrés aux Israélites français et étrangers.
Toute personne de race juive est tenue de se présenter dans un délai d’un mois au Commissariat ou à la Gendarmerie de son domicile pour faire apposer la mention « JUIF » sur sa carte d’identité et sur sa carte individuelle d’alimentation.
L’ordonnance allemande du 7 octobre 1940 exige que les cartes d’identité des Juifs soient tamponnées de la mention « Juif ». Ils ont jusqu’au 25 octobre pour régulariser la situation à la Préfecture sous peine de sanction.
Le tampon rouge réglementaire mesure 3,5 cm sur 1.5 cm. Un contrevenant peut être sanctionné, et sa carte d’identité retirée en raison de cette négligence ou faute.
Le Feldkommandant Reichardt rappelle que cette décision ne souffre pas d’exception.
En décembre 1940, la Feldkommandantur annonce que tous les dossiers administratifs des Juifs doivent également être marqués d’un cachet rouge « Juif ».
Voilà pourquoi le Préfet du département de Belfort répercute cette demande auprès des maires sur tous les dossiers de leurs administrés juifs.
L’aryanisation des établissements et biens juifs.
Le 23 septembre 1940, le Chef de l’administration militaire allemande en France promulgue une ordonnance qui interdit aux Juifs qui ont fui la zone occupée d’y retourner. Elle oblige les commerces juifs de la dite zone à se signaler par une affiche spéciale à hauteur des yeux.
Un liquidateur est nommé pour saisir et vendre les marchandises des commerçants juifs qui se sont enfuis de Belfort à la déclaration de guerre ou avant l’occupation.
Le produit de la vente est mis à la disposition de l’armée allemande par l’intermédiaire de la Ortskommandantur.
Depuis octobre 1940 dans la zone occupée, les Juifs doivent céder leurs droits sur les entreprises à des « Aryens ». Le Président de la Chambre de commerce de Belfort reçoit de la Préfecture la liste des commerces appartenant à des Juifs.
Une liste de 14 magasins et de la valeur estimée ou retirée est établie en mars 1941.
En 1941, une enquête est menée par le ministère de l’intérieur pour juger de l’utilité de conserver ou non certains commerces confisqués aux Juifs. Le commissaire spécial de police mandaté à cette tâche doit établir une liste avec les entreprises commerciales devant être maintenues et celles dont la disparition n’est pas dommageable à l’économie du département.
Son état renseigné montre une dizaine à conserver et une quinzaine dont la cessation d’activités n’est pas vitale.
Le commissaire fait une fiche pour chaque commerce, le plus souvent la fermeture ne porte pas préjudice à l’économie locale. YYYYY
Cependant certaines semblent fort utiles comme l’entreprise commerciale Lehmann de fers et métaux en cette période de pénurie de matières premières.
Mais certains commerçants n’apprécient pas cette enquête inquisitoriale n’hésitent pas à le faire savoir auprès de l’Inspecteur en mission qui n’est pas le bienvenu.
Il existe à Belfort une Direction du service de surveillance des biens israélites, elle va examiner le cas du commerce « Aux Travailleurs » de l’avenue Jean Jaurès.
Elle siège au 17 rue de la République.
Ce ne sont pas seulement les commerces des Juifs qui sont réquisitionnés, ce sont aussi leurs maisons.
Des déplacements sous contrôle
Loi du 9 novembre 1942
Par mesure de sécurité intérieure, tout étranger juif est astreint à résider sur le territoire de la commune où il a sa résidence habituelle et ne peut en sortir que muni d’un titre de circulation régulier, d’un sauf-conduit, ou d’une carte de circulation temporaire.
Sixième ordonnance du 7 février 1942 relative aux mesures contre les Juifs.
Journal Officiel des ordonnances du Gouverneur militaire pour les territoires occupés du 11 février 1942
En vertu des pleins pouvoirs qui m’ont été conférés par le Führer und Oberster Befehlshaber der Wehrmacht, j’ordonne ce qui suit :
§ 1. Limitation des heures de sortie. Il est interdit aux Juifs d’être hors de leurs logements entre 20 et 6 heures.
§ 2. Interdiction du changement de résidence. Il est interdit aux Juifs de changer le lieu de leur résidence actuelle.
§ 3. Dispositions pénales. Celui qui contreviendra aux dispositions de la présente ordonnance sera puni d’emprisonnement et d’amende, ou d’une de ces peines. En outre, le coupable pourra être interné dans un camp de Juifs.
A partir du 1er juillet 1942, les Juifs qui changent de résidence pour une durée de plus de 30 jours doivent le déclarer au commissariat ou à défaut à la mairie.
Mme Weill, belfortaine réfugiée d’Alsace, a été appréhendée avec sa fille par la Feldgendarmerie et emprisonnée quinze jours à Besançon. Sa fille est déportée au camp de Pithiviers. Elle demande l’autorisation au Préfet de pouvoir rejoindre sa sœur dans les Vosges.
Mais ce n’est pas le Préfet du département de Belfort qui donne l’autorisation du changement de domicile mais le chef de la Sicherheitzpolicei à Dijon.
Pourtant cette belfortaine qui veut passer un mois avec sa famille chez sa belle-mère dans le Doubs espère en juillet 1943 la bienveillante autorisation du Préfet.
Le maire de Giromagny s’inquiète de n’avoir pas reçu le formulaire ad hoc dont il a besoin pour signaler un enfant de 11 ans qui vient passer ses vacances chez une de ses cousines dans sa commune.
Le camp d’Auschwitz I
(photos : René Bernat)