37 – Rafle rue de Turenne
49 rue de Turenne (photos : René Bernat)
(photos : R. Bernat, Famille Wehrlé et A. Sachet)
(sources : ADTB)
Liste des noms de Juifs déportés, Mémorial de la Shoah, Paris (Photos : Coralie Bernat)
Des Juifs à Valdoie. (Témoignage de Paulette Monchablon, jeune femme vivant à Valdoie en 1944) – 2015
Journée nationale du Souvenir
La Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation, ou plus simplement Journée nationale du souvenir de la déportation, est une journée nationale française au cours de laquelle est célébrée la mémoire des victimes de la déportation dans les camps de concentration nazis, pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a lieu le dernier dimanche d’avril.Cette date a été retenue en raison de sa proximité avec la date anniversaire de la libération de la plupart des camps, et parce qu’elle ne se confondait avec aucune autre célébration nationale ou religieuse existante. Elle a été instaurée par la loi du 14 avril 1954, sur proposition du sénateur Edmond Michelet, qui faisait partie du réseau de résistance Combat et fut lui-même déporté à Dachau.
La Journée nationale du souvenir des victimes de la déportation honore la mémoire de tous les déportés sans distinction et rend hommage à leur sacrifice. Cette journée a pour vocation de rappeler à tous ce drame historique majeur, les leçons qui s’en dégagent, pour que de tels faits ne se reproduisent plus.
Allocution prononcée le 22 avril 2016 à la Synagogue de Belfort par René Bernat, enseignant d’histoire au collège René Goscinny de Valdoie
(photos : Nadia HOFNUNG)
– La SHOAH nous effraie par des listes interminables de noms, des chiffres terrifiants, des statistiques traumatisantes… Mais derrière ces noms il y avait avant tout des êtres humains de chair et de sang, des enfants, des femmes, des hommes qui ont vécu parmi nous, ont travaillé, souffert, ri, aimé, à nos côtés, et puis brutalement ont disparu à jamais et souvent sans laisser de traces.
– Yaël HASSAN est un auteur de littérature de jeunesse. D’origine juive, issue d’une famille polonaise qui a été exterminée, elle aborde le thème de l’antisémitisme nazi dans plusieurs de ses ouvrages. Elle a été invitée dans plusieurs collèges du Territoire de Belfort. A la question d’un élève : « Vous n’en avez pas assez de toujours traiter ce même thème de la persécution et de la déportation des Juifs, n’avez-vous pas peur de lasser votre public ? » elle a répondu : « 6 M de Juifs ont été exterminés, il y a donc 6 M de livres à écrire ! »
– Permettez-nous pendant quelques instants d’ébaucher devant vous le livre d’une jeune fille de 19 ans, Paulette WILLAR qui a vécu parmi nous à Valdoie, il y a 70 ans. A partir de quelques traces et indices, nous allons essayer d’esquisser cette tranche de vie bien trop brève. Dans cette démarche nous suivons la voie empruntée avec talent en 1997 par Patrick MODIANO qui le fit pour Dora BRUDER, jeune fille juive parisienne, disparue et déportée en 1942. Si nous avons pour Paulette des certitudes, nous formulerons également quelques hypothèses et de fortes probabilités
– Paulette WILLAR est née le 08 mai 1925 à Strasbourg. Elle est la fille d’un couple alsacien : Justin WILLAR, son père né à Obernai ; Jeanne LEVY, sa mère, à Réguisheim. Le couple s’est marié à Réguisheim le 7 février 1924, le père avait 34 ans et sa maman 33 ans. Un an après la naissance de Paulette, un second enfant, un garçon prénommé Jules, vient agrandir et égayer la famille. Justin WILLAR exerce le métier de tapissier, son épouse sans profession s’occupe de la maison.
– En 1939, l’Alsace abrite 30 000 Juifs mais après l’armistice du 22 juin 1940, les deux départements et la Moselle sont à nouveau rattachés au Reich allemand. Ils doivent être rendus Judenrein, débarrassés de toute présence juive. Le 16 juillet les Allemands décident l’expulsion des Juifs d’Alsace vers la zone libre. En trois jours du 14 au 16 juillet 1940 environ 17 000 juifs alsaciens, ceux qui n’avaient pas été émigré auparavant, sont chargés dans des camions allemands et lâchés de l’autre côté de la ligne de démarcation en zone sud. Le consistoire central du Haut Rhin s’installe à Clermont-Ferrand.
– Ce n’est pas le cas de Paulette WILLAR. Nous la rencontrons à Valdoie en octobre 1940, son visa de carte d’identité lui est délivré le 28 du mois et dans la marge de l’état de recensement des israélites du département, il est noté « réfugiés alsaciens ».
Pourquoi la famille WILLAR est-elle ici dans la zone occupée dite interdite ? Avait-elle des connaissances locales ? Nous n’en savons rien. Depuis longtemps l’Alsace et Belfort entretiennent des relations très proches liées à l’annexion prussienne de 1871, des liens affectifs mais aussi économiques et commerciaux.
– Elle habite avec ses parents au 49 rue de Turenne à Valdoie, une petite maison sur la gauche de la grande route qui monte vers Giromagny. Ils vivent modestement, possèdent quelques bêtes parquées derrière chez eux ce qui attire les enfants qui viennent voir les chèvres « des petits Juifs » comme ils disent. Pour survivre, le père tapissier confectionne des matelas. Elle et sa mère sont notifiées comme étant sans profession alors qu’on trouve la mention d’ouvrier ajusteur pour Jules, son jeune frère de 18 ans.
« Heureux comme un Juif en France ». C’est une expression du XIXe siècle, traduite du yiddish, à une époque où, en Europe, seule la France avait émancipé les Juifs et les avait mis au rang de citoyens de plein droit au point de faire rêver autrefois les Juifs ashkénazes vivant en Allemagne, en Russie ou en Europe de l’Est. En s’installant à Valdoie, Paulette WILLAR et sa famille pensaient donc y trouver la liberté, la dignité et au moins la sécurité.
Mais l’arrivée à Valdoie de la famille WILLAR, en octobre 1940, correspond au premier statut des Juifs qui met en place les mesures antisémites en France et amorce toute une législation d’exclusion.
Paulette a donc subi et enduré les lois racistes infamantes et discriminatoires :
– Le 27 septembre 1940 la 1ere ordonnance allemande prescrit le recensement obligatoire des Juifs en zone occupée, ils doivent obtempérer jusqu’au 20 octobre. C’est donc la 1ere rencontre avec Paulette WILLAR aux archives départementales. Son nom figure la liste des israélites réclamée sans cesse par l’occupant. Nous le retrouverons dans les recensements ultérieurs de 1941, 1942, 1943. Il se place dans la colonne femme de 16 à 45 ans.
– A la même époque, elle a dû d’abord aller se faire apposer la mention « Juive » à l’encre rouge sur sa carte d’identité. L’ordonnance de l’administration militaire allemande précise que l’estampille rouge est un rectangle de 1,5 cm sur 3,5 cm. Le Préfet de police local veille à son application. A partir d’août 1943 la mention sera portée par perforation pour éviter les fraudes.
– Paulette WILLAR doit ensuite certifier de sa nationalité. Fin avril 1942, le Maire de Valdoie répond à la demande du Délégué Régional Adjoint à la Police des Questions Juives qu’elle est bien française. Cela la sauve provisoirement de l’arrestation. En effet, le 12 juillet 1942, sur ordre du préfet régional de Dijon a lieu la 1ere rafle locale. Elle frappe les Juifs étrangers de Belfort. Quelques jours plus tard, les 16 et 17 juillet 1942 se sera à Paris, la funeste rafle du Vel d’Hiv au cours de laquelle la police française arrête plus de 13 000 juifs. Vichy pour tenter de se justifier par la suite a mis en avant sa volonté de protéger les Juifs français. On sait ce qu’il adviendra…
– La famille WILLAR est assujettie à l’amende du milliard imposée le 14 décembre 1941 par les autorités d’occupation aux Juifs de la zone occupée. C’est l’Union Générale des Israelites de France, l’UGIF, qui doit prendre en charge le versement et pour se faire lance un emprunt auprès de 29 banques. L’UGIF, placée sous le contrôle du Commissariat général aux questions juives, assure la représentation des Juifs auprès des pouvoirs publics. Le remboursement doit s’effectuer sur des prélèvements opérés sur les comptes bancaires de particuliers et sociétés juifs. Sa famille se voit donc amputer d’une partie de ses maigres ressources.
– Le 4 juin 1942 Paulette se rend à la mairie de Valdoie pour récupérer l’étoile juive. L’ordonnance allemande du 29 mai 1942 l’impose pour tous les Juifs âgés de plus de 6 ans. Comme la loi le demande elle doit céder trois points de tickets textiles pour obtenir ses trois étoiles règlementaires. Sa famille fait de même et chacun émarge sur un formulaire particulier. Nous connaissons donc sa signature retrouvée aux Archives Départementales. Le Préfet du département écrit à l’intendant de la Police régionale à Dijon qu’il a distribué 648 insignes, il lui en manque donc certainement pour fournir les trois exemplaires des 234 juifs recensés pour le département du Territoire de Belfort en 1941.
– Les Juifs de la zone occupée sont désormais placés dans une situation de parias par les lois françaises et les ordonnances allemandes. Paulette ne peut circuler librement, elle ne peut plus fréquenter les lieux publics : cinéma, bibliothèque, marché. Elle ne peut plus aller au square Emile Lechten à Belfort ni fréquenter les parcs publics. Début 1942, une ordonnance allemande exige le couvre-feu entre 20 heures et 6 heures du matin pour les Juifs en zone occupée. Elle n’a pas le droit de posséder un vélo. L’usage du téléphone lui est également interdit par la loi. Paulette, en tant que juive, ne peut entrer dans les magasins et faire ses achats que de 15h à 16h.
– Le maire de Valdoie signale à la préfecture qu’aucun des dix israélites de sa commune n’a d’ appareil TSF à rendre et à amener à la police comme doivent le faire tous les Juifs en vertu de l’ordonnance allemande du 18 août 1941.
– Dans l’hypothèse où la famille possédait une maison à Réguisheim, elle a été mise sous séquestre, qualifiée de « Bien des ennemis du peuple et du Reich en Alsace » confisquée, aryanisée, vendue.
– Le 26 février 1944 Paulette est victime d’une rafle de la police et de la gendarmerie française. A ce moment-là, la remise des listes de Juifs français à la Gestapo s’est généralisée. Avec les trois autres membres de sa famille, elle est amenée au centre de rassemblement de Belfort. Nous n’avons pas trouvé sa trace sur le registre d’écrou de la prison de Belfort où pourtant sont inscrits de nombreux Juifs arrêtés du Pays de Montbéliard. Ce n’est pas étonnant, deux semaines plus tôt le surveillant-chef de la maison d’arrêt de Belfort écrivait que les 116 places de son établissement étaient déjà occupées et qu’il était impossible de prévoir un effectif plus élevé sans compromettre la sécurité de la Maison. Mais les lieux de détention ne manquent pas à cette époque. Dans une note la police allemande précise que si les locaux de la prison ne suffisent pas il est possible d’utiliser des hôtels surveillés comme camp de rassemblement.
– Comme les quatre WILLAR sont arrêtés le même jour et dans les mêmes circonstances six autres personnes de Valdoie, membres de la famille Dreyfuss-Lehmann, juifs alsaciens, réfugiés au 14 avenue de la gare. En ce jour funeste du 26 février 1944, 96 Juifs sont incarcérés à Vesoul et 109 à Belfort. Ces deux vieilles communautés israélites, implantées depuis longtemps, sont brutalement anéanties.
– Paulette WILLAR est envoyée au camp de rétention de Drancy. Le 26 février 1944, il enferme 1 984 prisonniers, le lendemain 2 187, le surlendemain 2261. Chaque jour l’effectif évolue en fonction des rafles et des départs vers Auschwitz. En période de pointe, en 1942, il a retenu jusqu’à 5 000 personnes et le camp a connu le départ de deux ou trois convois par semaine. Depuis 1942 Drancy est passé du statut de camp d’internement à celui de camp de transit, antichambre de la mort, dernière étape avant la déportation vers les camps d’extermination. Environ un mois après Paulette Willar, les enfants d’Izieu, connaitront aussi ce sinistre bâtiment de quatre étages, bâtiment en U de la cité de la Muette, surnommé le « Fer à cheval » en raison de sa forme, organisé autour d’une cour-prison d’environ 200 mètres de long et 40 mètres de large. Quand Paulette WILLAR y arrive, la gestion se fait par les services allemands et non plus par la gendarmerie française comme avant juillet 1943. Au total, sur les 74 000 juifs déportés de France, 67 000 comme Paulette sont partis de Drancy.
– Du camp de rétention où elle demeure à peu près une semaine, Paulette WILLAR est amenée à la gare de Bobigny. Elle se trouve dans le convoi N°69 à destination d’Auschwitz mais elle ne le sait pas encore. 79 sinistres convois de la mort partiront jusqu’en août 1944. Le sien s’ébranle le 7 mars 1944 et comprend 1 501 personnes, c’est le convoi avec le plus grand nombre de déportés partis de France. La plupart du temps les convois comptent 1000 personnes. Chaque juif doit se munir de vivres pour trois jours. Ce transfert de plus de soixante heures est un cauchemar indescriptible, une vision d’enfer. Dans chaque wagon un ou deux seaux d’eau et un seau hygiénique, quatre-vingt à cent personnes y sont empilées. L’entassement sur un peu de paille, la promiscuité, les disputes, la tinette qui déborde, la puanteur, le risque d’asphyxie, la soif, la faim, les cris, les pleurs, les gémissements, l’épuisement total tout cela entraîne, dramatique ironie du sort, l’impatience d’arriver au plus vite. Mais entend les bruits de ferraille des wagons que l’on déplombe, ça y est, le train est arrivé à Birkenau. Les portes s’ouvrent enfin et glissent en grinçant. Première vision d’épouvante, ce ne sont que cris, hurlements, coups de sifflets, aboiements de chiens, puis les coups de matraque des SS. « Raus, raus, dehors ! ». Ce qui la choque le plus c’est la vue de ces dizaines de bagnards squelettiques aux crânes rasés, habillés de pyjamas rayés et portant chacun un numéro et une lettre majuscule indiquant sa nationalité. Ils montent dans son wagon et retirent les corps inertes. Ils ont un aspect pitoyable et se traînent avec peine sans cesse frappés par le nerf de bœuf d’un surveillant vociférant. Sur le quai, Paulette n’est pas sélectionnée.
– Paulette WILLAR est peut-être séparée des siens, peut-être encore avec eux. Elle doit marcher un peu pour rentrer dans le camp d’Auschwitz-Birkenau, ce n’est que deux mois et demi plus tard en mai 1944 avec le convoi N° 74, que la sélection s’effectuera à l’intérieur du camp sur la nouvelle rampe construite pour l’arrivée massive des Juifs hongrois. Les plus âgées, les enfants, les plus fragiles montent déjà dans des camions sous la garde des SS.
– Le 12 mars 1944 avec ses parents et son frère, avec cinq autres Valdoyens du 14 rue de la gare, avec 1300 autres juifs Paulette WILLAR entre dans la chambre à gaz.
Qui se souvient d’elle aujourd’hui ? Qui se souviendra d’elle demain ?
– Pas de tombe, pas de stèle dans un cimetière. Son nom est absent sur le monument aux Israélites disparus inauguré à Belfort. Cela s’explique, c’était une réfugiée, une déracinée.
– Pas de descendants, pas de famille. Toute la famille WILLAR a été anéantie. En plus de ses parents et de son frère deux tantes de Paulette ont également été déportées sans retour.
– Pas de déclaration et de feuille de témoignage auprès de l’organisme Yad Vashem chargé d’entretenir le souvenir et la mémoire des disparus de la shoah. Ce qui n’est pas le cas pour la famille Dreyfuss-Lehmann puisqu’une une fille survivante a entrepris des démarches.
– Pas de déclaration de décès à la mairie de Valdoie comme il a été fait pour les six autres raflés valdoyens qui ont obtenu les mentions « mort pour la France » et « mort en déportation ».
– Nous avons écrit aux mairies d’Obernai et Réguisheim d’où était originaire la famille. Pas de réponse précise !
« Le bourreau tue toujours deux fois, la seconde fois par l’oubli » nous dit Elie Wiesel.
Tomber dans l’oubli c’est mourir une deuxième fois ! Que nous reste-t-il aujourd’hui qui évoque cette jeune fille de 19 ans ? Presque rien. Un nom parmi les 76 000 sur le mur des victimes au Mémorial de la Shoah à Paris, peut être également sur un monument aux morts d’une commune alsacienne. Nous avons interrogé quelques vieilles personnes qui ont croisé sa route il y a bien longtemps mais la mémoire flanche, les souvenirs s’estompent, les certitudes ont laissé place au doute.
Livre des Prophètes – Ésaïe chapitre 56 ; Verset 5
« Je donnerai dans ma maison et dans mes murs une place et un nom ;
Je leur donnerai un nom éternel qui ne périra pas. »
Voilà le sens de notre démarche de notre projet pédagogique. A Paulette Willar nous voulons leur donner un nom éternel qui ne périra pas.
– Lors de l’année scolaire 2014-2015, à l’occasion du 70eme anniversaire de la Libération avec une vingtaine d’élèves du collège Goscinny de Valdoie nous avons réalisé un beau projet intitulé « Valdoie 1944 : sur les chemins de la liberté ». Soutenu par les collectivités locales, la Mairie de Valdoie et le Conseil Départemental, il a donné naissance à un livret, à 35 panneaux urbains permanents munis de QR codes qui renvoient à un site Internet. Mais nous ne connaissions pas alors le destin tragique de ces dix valdoyens d’adoption. Nous avons donc décidé de compléter ce circuit pour évoquer ce dramatique épisode.
Il faut garder le souvenir pour éviter une deuxième mort.
– Après les collégiens, nous travaillons actuellement avec les élèves de CM2 de la classe de Mme DUTERTRE de l’école Victor Frahier à Valdoie. Je la remercie d’avoir adhéré à notre proposition. Cette école est située à quelques dizaines de mètres de la maison où a vécu la famille WILLAR. Ce projet a fait réfléchir les enfants.
Nous sommes allés découvrir l’exposition temporaire « Retour sur l’abîme » organisée cette année par les Musées de Belfort, les écoliers ont écrit leurs impressions :
Tatiana : « Lors de ma visite à l’exposition de la Tour 46, j’ai vu une œuvre d’art qui me faisait peur et qui ressemblait à un pont avec des rails qui entraient dans des tunnels sombres. On ne savait pas ce qu’il y avait derrière ce tunnel sombre. Les couleurs étaient inquiétantes, il n’y avait que du blanc, du gris et du noir. »
Arthur : « L’œuvre qui m’a le plus choqué c’est le dessin de la photo du petit garçon juif avec sa maman et se faisant tirer dessus par les nazis. Cette image m’a horrifié. Ce que les nazis, ont fait aux Juifs est horrible. Ce qui m’a le plus terrifié c’est que les nazis n’ont pas épargné les enfants. J’ai eu des frissons en voyant l’image. »
Baptiste : « J’ai été très touché par le tableau où un enfant allait être tué. Je me suis rendu compte directement de la situation à cette époque. C’était horrible et douloureux. Adolf Hitler était un vrai criminel. Je me rappellerai longtemps de ce tableau. »
Dora : « En regardant un tableau représentant un camion plein de corps j’ai été apeurée car il aurait pu y avoir des personnes de ma famille issue des gens du voyage ».
Sabrina : « L’œuvre qui m’est restée en tête c’est le tableau de la fin du monde de Félix Nussbaum. On y voit le corbeau, les squelettes qui sortent de la terre, les foulards noirs accrochés sur les barreaux des fenêtres, le ciel qui devient gris. Il m’est resté en tête car on ne peut pas savoir quand ce sera la fin du monde. Tout peut arriver d’un moment à l’autre sans prévenir. »
Nous collectons souvenirs, témoignages et information et nous allons créer deux panneaux supplémentaires. « Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre.» a écrit Winston Churchill.
Ce projet s’inscrit dans le travail de mémoire si souvent évoqué mais aussi et surtout à la nécessité du devoir de vérité historique. Il participe également à un signal d’alerte pour un avenir quelque fois inquiétant dans notre société ébranlée aujourd’hui dans ses fondements républicains de tolérance et de bien vivre ensemble.
Voilà notre modeste contribution d’enseignants et de pédagogues au souvenir et à la commémoration de la Shoah.
Les mesures antisémites
==> D’autres thématiques en page 36 : Traque rue de la Gare
Le retrait des postes de radio
Ordonnance du 8 juillet 1942
Le téléphone est coupé pour les Juifs et l’usage des cabines téléphoniques publiques leur est interdit.
Une ordonnance allemande du 13 septembre 1941 a interdit aux Juifs de posséder en zone occupée des appareils radiophoniques.
Ils doivent être livrés au Feldnachrichtenkommandantur
Le Préfet du département de Belfort signale au Feldkommandant de Besançon avoir collecté 16 postes TSF auprès des Juifs de son département. 12 à Belfort, 2 à Foussemagne, 1 à Bavilliers et un dernier à Montreux-Château.
Ces appareils sont réquisitionnés dans trois services mais surtout pour la Feldnachrichtenkommandantur qui en récupère 13. Une quittance de reconnaissance de livraison lui est délivrée.
Les particuliers viennent les déposer au commissariat central de police à Belfort.
L’institutrice d’une école de Belfort demande de pouvoir en récupérer un pour en faire bon usage avec ses élèves.
Le maire de Montreux-Château atteste avoir reçu un appareil, mais celui de Valdoie déclare n’en avoir récupéré aucun.
Huitième ordonnance du 29 mai 1942, signe distinctif pour les Juifs
1. Les Juifs doivent se présenter au Commissariat de police pour y recevoir les insignes en forme d’étoile. Chaque Juif décevra trois insignes et devra donner en échange un point de sa carte de textile.
2. Il est interdit aux Juifs dès l’âge de six ans révolus de paraître en public sans porter l’étoile juive.
3. L’étoile juive est une étoile à six pointes ayant les dimensions de la paume d’une main et les contours noirs. Elle est en tissu jaune et porte en caractères noirs l’inscription « JUIF ». Elle devra être portée bien visiblement sur le côté gauche de la poitrine solidement cousue sur le vêtement.
La Préfecture du département de Belfort doit établir des listes avec les Juifs ayant reçu l’étoile jaune, elle distingue sur ces états hommes et femmes.
Le 8 juin 1942, le Maire de Valdoie envoie un bordereau à la Préfecture. Dix Juifs résident dans sa commune, à chacun il délivre trois étoiles mais ils doivent donner en échange un ticket coupon textile. Deux israélites n’en ont pas. Il n’a donc récupéré que 24 points de textile retirés des cartes de vêtements.
L’échange se fait le 4 juin 1942, les Juifs doivent émarger et reconnaître la remise de l’insigne.
Le 13 juillet 1942, le Commissaire central écrit au Préfet qu’il a délivré deux étoiles à 161 personnes à Belfort. Il lui manque 48 insignes pour pouvoir délivrer à chacun les trois étoiles réglementaires.
Sur la liste nous voyons que 2 étoiles sont délivrées et assez souvent figure la mention SP, sans point de textile à remettre.
Loi du 29 novembre 1941 Instituant une Union Générale des Israélites de France.
- Il est institué auprès du Commissaire général aux Questions juives une Union Générale des Israélites de France. Cette Union a pour objet d’assurer la représentation des Juifs auprès des pouvoirs publics.
2. Tous les Juifs sont obligatoirement affiliés à l’U.G.I.F. Toutes les associations juives existantes sont dissoutes à l’exception des associations culturelles.
3. Les ressources de l’U.G.I.F.
a) les sommes récupérées par le Commissariat aux Questions juives
b) les biens des associations juives dissoutes
c) les cotisations versées par les Juifs selon leur fortune.
4. L’U.G.I.F. est administrée par 18 Juifs de nationalité française et désignés par le Commissariat aux Affaires juives.
5. Les délibérations du conseil peuvent être annulées par arrêté du Commissaire aux Affaires juives. Le présent décret est exécuté comme loi de l’Etat.
Ordonnance du 17 décembre 1941, concernant une amende imposée aux Juifs.
L’amende d’un milliard de francs imposée aux Juifs de zone occupée, par avis du « Militarbefehishaber in Frankreich » du 14 décembre 1941, doit être répartie sur les biens juifs par l’intermédiaire de l’Union Générale des Israélites de France
En décembre 1941, les autorités d’occupation ont décrété une amende de 1 milliard de francs à payer par les Juifs. L’Union Générale des Israelites de France (UGIF) doit gérer la répartition pour les membres de la communauté, elle a donc besoin de listes de recensement.
Le commissariat général aux questions juives réclame au Préfet du Territoire de Belfort des compléments et des précisions pour que cette répartition puisse se faire.
Arrêté du 11 mai 1943, Consécutifs aux ressources de l’U.G.I.F.
Les contributions volontaires des Juifs pourront être prélevées sur leurs comptes bloqués.
Pour faire face à l’insuffisance des contributions volontaires, les taxations suivantes sont imposées à la communauté.
Tous les Juifs de 18 ans au moins doivent payer 120 F en Zone 0ccupée et 360 F en Zone Non 0ccupée par an.
Le paiement de la cotisation sera constaté par l’apposition d’une vignette sur une carte spéciale.
Les versements peuvent être trimestrels ou semestriels.
La carte spéciale doit être jointe à la carte d’identité et présentée à toute réquisition
L’Etat Français a décidé un prélèvement d’une contribution de 5% sur les opérations de retrait effectuées sur des comptes courants postaux ouverts à des Juifs.
Les Juifs étrangers âgés de 16 à 45 ans doivent être arrêtés et transférés au camp de concentration de Pithiviers.
Une liste établie nous montre que nombre d’entre eux ont été victimes des rafles de juillet 1942.
Début février 1944, le surveillant-chef de la prison de Belfort écrit que son établissement d’une capacité de 116 places ne peut guère en accueillir davantage.
Le 26 février 1944, les Juifs arrêtés dans le Pays de Montbéliard sont déportés vers Drancy. Nous avons les registres d’écrou qui attestent de leur incarcération à la prison de Belfort.
Une liste du 7 mars 1944 nous apprend qu’une rafle fin février 1944 a concerné une quarantaine de Juifs français du département dont dix de Valdoie.
En effet, le 26 février 1944, la communauté juive du Territoire de Belfort est anéantie avec l’arrestation de 1109 membres.
source : « Le calendrier de la persécution des Juifs de France » Serge Klarsfeld.
Le camp de Birkenau
(photos : René Bernat)
La rafle du Vel d’hiv