1- Les bombardements de 1940

 

 

Site N°101

 

      Les bombardements aériens massifs marquent la Seconde Guerre mondiale. La population doit savoir s’en protéger. Ils provoquent de considérables dommages tout au long du conflit.

 

 

Les bombardements de Belfort. (Témoignage de Denise Weibel, jeune fille vivant à Belfort en 1944) – 2015

 

La Défense Passive

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ad09003_anu030011fi0302018_x                  La défense passive est un organisme civil né au début des années 30, dépendant du ministre de l‘Intérieur. Elle vise la protection de la population en cas de guerre : diminuer les pertes en vies humaines, restreindre les dégâts causés par les bombardements et faire face aux engins explosifs, incendiaires ou toxiques.

Les progrès de l’aviation depuis la fin de la Grande Guerre amènent les autorités à penser que les bombardements aériens, en cas de futur conflit, ne seront pas localisés sur la ligne du front. Le rayon d’action des avions est pratiquement illimité. Aucune population n’est à l’abri. La loi du 9 avril 1935 organise ainsi la Défense passive. Ses buts : la sauvegarde et la protection de la population civile contre les attaques aériennes.

Elle met alors en place des services opérationnels et des installations pour la sauvegarde des populations. Ses missions sont aussi variées que la construction et l’utilisation des abris collectifs ; la protection individuelle contre les gaz de combat ; la reconnaissance et la destruction des bombes non éclatées ou encore la mise en place de services sanitaires.

Plusieurs services composent la Défense passive : le service incendie, le service sanitaire, le service de police, le service de protection contre les gaz, le service de déblaiement.

Le service de Défense passive met en place un réseau de surveillance et d’alerte (sirénes). Les équipes construisent des abris souterrains et recensent les lieux pouvant servir d’abris (métro, caves…). Elles informent et sensibilisent la population (par voie d’affiches, de radio…)  sur la conduite à tenir en cas d’alerte : extinction des feux, se diriger vers l’abri le plus proche, etc. Elles renseignent sur l’utilisation des moyens de protection individuels en cas d’attaque chimique (gaz).ad09003_anu030011fi0301006_x

Des instructions sont données aux maires par le biais de circulaires mais également par l’intermédiaire de brochures, de documentation. Certaines aident la population dans la reconnaissance des engins de destruction mais, ce sont surtout les membres des brigades passives qui participent au désamorçage des bombes.

Les membres de la Défense passive doivent être clairement identifiés de la population. Une liste de ces membres est affichée afin de permettre la bonne marche des secours lors des sinistres.

ad09003_anu030011Fi0301010_x                    Deux équipes coexistent, celle de la « sécurité générale » chargée de la prise en charge des blessés en coopération avec le corps des sapeurs-pompiers ;  et celle du « déblaiement » chargée de l’enlèvement des décombres. Les membres de cette brigade portent un brassard pour permettre à la population leur identification et ne pas les confondre avec d’éventuels pilleurs.

            A partir de 1940, les autorités allemandes, contribuent elles aussi à la prise de mesures de Défense passive. Des ordonnances et affiches sont apposées sur les places publiques. Le camouflage des fenêtres constitue la plus grande crainte des autorités occupantes car les lumières, vues du ciel, renseignent les troupes alliées et favorisent des frappes plus précises. Des mesures sont donc prises pour interdire à la tombée de la nuit toute lumière.

Les installations mises en œuvre par la Défense passive pour la protection de la population sont diverses : tranchées permanentes, caves, et abris.

En ce qui concerne le personnel de la Défense passive, il s’agit de volontaires hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, appartenant à un service déterminé et remplissant une fonction bien précise.

Veiller à ce que les lumières soient occultées, faire descendre la population dans les abris en cas d’alerte, initier les gens à l’emploi du masque à gaz, prêter la main aux pompiers et aux secouristes … voilà les tâches du chef d’îlot de la Défense passive pendant l’occupation. Des masques à gaz sont distribués à la population.

                   Afin de tenter de prémunir maximum la population des bombardements, la Défense passive prend de nombreuses mesures de protection notamment par l’instauration d’un couvre-feu.ad09003_anu030011fi0302014_x Ainsi, l’organisation fournit aux habitants des tissus de coton bleu marine qui permettent d’occulter les fenêtres si on ne peut fermer les volets. Dans les trains, les ampoules sont peintes en bleu. Tout ceci afin d’empêcher aux bombardiers alliés de pouvoir facilement repérer leurs cibles la nuit tombée.

(Affiches : ADTB)

 

La Luftwaffe et les bombardements de 1940

           « Luftwaffe » signifie littéralement « arme de l’air », elle définit la force aérienne allemande au sein de la Wehrmacht sous le Troisième Reich (du 1er mars 1935 au 8 mai 1945). Créée le 1er mars 1935, la Luftwaffe est l’armée de l’air allemande sous le IIIème Reich. Elle a comme chef Hermann Göring, As et héros de la première guerre mondiale et second personnage le plus important du IIIème Reich. L’arme fatale de la Luftwaffe est le « stuka » qui signifie « bombardier en piquet », en effet le Stuka est reconnaissable à ce style caractéristique avec des pilotes surentraînés à supporter la pression. Les stukas font preuve de leur efficacité pour la première fois lors de la guerre civile espagnole (1936-1939) avec des bombardements des villes républicaines qui causent des milliers de morts. La défaite de la France en 1940 s‘explique entre autres  par la supériorité aérienne des Allemands qui bombardent les blindés français ainsi que les voies de communication et les civils qui fuient. La Luftwaffe sera dissoute le 8 mai 1945 après la reddition allemande.

 

 Bombardement allemand sur les cités-jardins du quartier Bellevue de Belfort le 14 juin 1940. Trois morts. (Coll privée René Grillon)

Bombardement allemand sur les cités-jardins du quartier Bellevue de Belfort le 14 juin 1940. Trois morts. (Coll privée René Grillon)

            Le 10 mai 1940, l’aviation allemande bombarde Valdoie. C’est par un beau matin de printemps que les riverains entendent un grondement : la Luftwaffe survole Valdoie puis largue quatre bombes au niveau des 52 et 54 rue du 1er Mai, faisant deux victimes, Pierre Groelly, quinze ans qui est tué et son jeune frère, Jean, blessé.  A ce premier assaut, un second fait suite deux heures plus tard : quatre bombes à nouveau, qui feront une victime, un bébé de dix mois, tué dans les bras de sa mère qui sera amputée.  Une troisième attaque dans la même journée de ce 10 mai 1940 détruira en partie l’aérodrome de Chaux. Le doute n’est plus possible : l’armée allemande est passée à l’offensive.

                 La France écrasée en quelques semaines en mai 1940

               La bataille de France débute le 10 mai 1940 après plusieurs mois de « Drôle de guerre ». La stratégie française consiste depuis des mois à attendre derrière la ligne Maginot un ennemi qui ne vient pas durant plus de  neuf mois. André Maginot était le ministre de la Défense qui la fit construire. Cette ligne protège toute la frontière Est de la France et remonte jusqu’à la limite des Ardennes. Ce massif montagneux n’est pas couvert par la fortification car il est  jugé infranchissable par les chars. La stratégie allemande très offensive repose sur la percée. Elle consiste à lancer une attaque fictive à travers le Benelux et à prendre à revers l’armée française en passant par le massif des Ardennes en utilisant la technique de la Blitzkrieg (guerre éclair). Elle combine l’action conjuguée des avions bombardiers et des chars regroupées en unités de perforation (panzerdivisions). Cette stratégie dite du « coup de faucille » s’avère payante au-delà de toute espérance. Au bout de quelques semaines les armées françaises, belges et le corps expéditionnaire britannique sont enfermés dans la poche de Lille et ensuite dans la ville de Dunkerque. Lors de cette bataille, l’Angleterre envoie toute sa flotte aussi bien civile que militaire pour évacuer les troupes menacées d’encerclement. Le sauvetage réussit mais le matériel abandonné aux Allemands est  conséquent. L’avancée allemande reprend de plus belle et le 14 juin 1940 Paris est déclarée « ville ouverte. Le gouvernement se réfugie à Bordeaux. Mis en minorité Paul Reynaud, le président du Conseil qui veut continuer la lutte démissionne. Le maréchal Pétain le remplace à la tête du gouvernement et il demande l’armistice qui sera signé le 17 juin. L’effondrement français est stupéfiant.

 

Le bombardement de l’usine Sochaux le 15 juillet 1943

Convoi de cercueils après le bombardements de Sochaux. (source : Archives municipales de Montbéliard)

Convoi de cercueils après le bombardements de Sochaux. (source : Archives municipales de Montbéliard)

              L’Allemagne a envoyé des techniciens pour superviser et diriger la direction française de l’entreprise Peugeot. L’usine doit  produire de fausses ambulances pour le front russe ainsi que des patins de chars. Il est même question, un moment, de fabriquer des pièces pour l’aviation. Il est donc essentiel pour les Alliés d’arrêter la production de cette machine de guerre au service de l’Allemagne. Décision est prise de bombarder l’usine et ce sont les Anglais avec la R.A.F. qui s’en chargeront.

                 Dans la nuit du 15 au 16 juillet 1943, 137 bombardiers britanniques de la RAF larguent près de 1 000 bombes. Cette opération est un relatif échec car il n’y eut qu’une trentaine de bombes sur l’usine, mais 700 tombent sur Sochaux, Vieux-Charmont, Nommay, Etupes et Allenjoie ! Seul l’atelier de mécanique est détruit et ceux de la carrosserie et de la fonderie sont endommagés. La forge et l’emboutissage, ateliers les plus importants de l’usine, ne sont pas atteints. En revanche, alentours le bilan est dramatique. Les quartiers ouvriers de la ville ont été touchés de plein fouet : 400 immeubles ou bâtiments sont détruits, on compte 120 morts, 250 blessés et plus de 1200 sinistrés. A Sochaux, une caserne de gendarmerie est complètement détruite, l’autre n’est plus habitable, la mairie, l’école et la poste n’existent plus. Il n’y a plus de distribution d’eau, ni d’électricité, ni de gaz. Les routes 473 et 468 ne sont plus praticables, de même que le canal du Rhône au Rhin dont une des digues est éventrée. Le résultat est tel que l’on craint que Londres, informée des résultats, lance une nouvelle attaque. Malgré tout, l’état d’esprit est bon, la population presque entièrement dépendante de l’usine, a compris la nécessité de ce bombardement.

         Les hypothèses sont nombreuses pour expliquer ce manque de précision. D’abord la RAF a pratiqué un largage à plus haute altitude que d’habitude pour éviter la DCA allemande installée la veille. Les avions anglais ont été gênés par un vent assez violent cette nuit-là.  La RAF a peut-être été trompée par une erreur de marquage des avions éclaireurs qui auraient confondu la cheminée de la brasserie de Sochaux avec celles de l’usine, confusion également entre les différents étangs du secteur à la lueur des fusées éclairantes.

 

Les bombardements de la Pépinière à Belfort en mai 1944

 

 

photos : ATDB

Photo 181

Robert Hofer. Le bombardement de la Pépinière par l’aviation américaine. (1944, Huile sur carton. Collection Musées de Belfort)

                 Les bombardements aériens massifs contre des objectifs militaires ou civils constituent une nouveauté de la 2e Guerre Mondiale. La méthode des Américains diffère de celle des Britanniques. Les bombardements britanniques ne sont ni plus précis, ni moins meurtriers que ceux des Américains. La campagne de bombardement allié qui se développe à partir de 1943 est bâtie sur le schéma suivant : les quadrimoteurs américains, B-17 « flying fortress » et B-24 «Liberator », bombardent de jour, à haute altitude, entre 6 000 et 8 000 mètres en moyenne. Cela implique du fait de l’altitude, une plus large dispersion des projectiles. Les Anglais, quant à eux, bombardent de nuit avec des quadrimoteurs « Lancaster » ou « Halifax » à moyenne altitude entre 4000 et 6000 mètres. La  précision  est théoriquement accrue du fait de l’altitude moindre mais le fait qu’ils bombardent de nuit et, le plus souvent, sans repères, entraine une dispersion des projectiles au moins aussi grande que chez les Américains. Si ces derniers ont toujours privilégié l’attaque de cibles industrielles stratégiques, le bomber command britannique quant à lui, se  concentre sur la destruction du « potentiel humain et ouvrier allemand ». Dans ce « Carpet bombing » (tapis de bombes) sur l’Europe occupée, un équipage pensera surtout à rentrer en vie plutôt qu’à la précision de son action, surtout si celui-ci fait partie d’un raid de 800 bombardiers voire plus.

Avec environ 75 000 victimes et 550 000 tonnes de bombes déversées, la France est, après l’Allemagne, le second pays le plus touché par les bombardements alliés de 1940 à 1945 sur le Front de l’Ouest.

                      Le Transportation Plan est le plan d’attaque des voies de communication, destiné à préparer le débarquement en Normandie, en mars 1944. Il s’agit de détruire les infrastructures de chemin de fer, notamment les gares de triage, afin d’empêcher l’armée allemande d’acheminer des troupes et du matériel vers l’ouest de la France. Malheureusement pour les civils français, les gares sont souvent intégrées à des zones habitées … C’est dans le cadre de ce plan que la gare de Belfort sera quatre fois bombardée entre mai et juillet 1944. On dénombrera 24 victimes (lors du premier raid) et d’importants dégâts, notamment sur le quartier de la Pépinière.

 

 

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